MUSEE COMPAGNONNIQUE DU MANOIR DE LA HAULTIERE
14 rue Guillon Verne - 44100 NANTES
Tél / Fax : 02 40 69 30 55


Heures d'ouverture :
visites guidées le samedi de 14 à 18 heures
pour les groupes ou autres jours sur rendez-vous

l'entrée est libre et gratuite, les dons sont les bienvenus

Plan d'accès au musée
 

 

Visite commentée du Musée de l'Union Compagnonnique

Chers visiteurs,

Aux amateurs de réminiscences nantaises, et aux connaisseurs en "Belle Ouvrage", le Musée du Manoir de la Haultière offre un cadre bien propice à la rêverie et beaucoup de vous, nous l'espérons, garderons un vif intérêt pour le patrimoine que nous a légué l'histoire, ainsi que pour la somme de travail et d'art que représentent les Chefs d'Oeuvre des Compagnons.

Edification du Manoir
Tandis que le quartier médiéval de la cité intra-muros de Nantes s'établissait avec le Manoir de la Touche (la porte Saint Pierre), un hobereau campagnard, le sieur BELONAN, fit élever le dit Manoir de la Haultière au XIVème siècle, sur les ruines d'un bâtiment précédemment détruit (nous ne savons rien sur ce sinistre, invasion des Vikings, Anglais, Français ou Espagnols ?).

La façade de cette gentilhommière, orientée vers l'est est percée de quinze ouvertures de formes diverses et distribuées irrégulièrement sur les trois corps du logis. Parmi celles-ci deux portes rectangulaires, ceintes de granit et deux autres de styles roman du XIVème siècle. Une cinquième porte est recouverte d'un porche historique, s'élevant au dessus d'un escalier tournant, lequel donne son entrée dans une vaste pièce ornée d'une cheminée monumentale (la seule qui ait été préservée lors d'anciens aménagements).

Des meneaux en granit partagent plusieurs fenêtres. Trois d'entre elles à l'étage supérieur sont surmontées de pignons ornementés de crochets à choux frisés et de monstres.

La tour hexagonale aujourd'hui découronnée de son toit pointu et de son panonceau nobiliaire (en prévision de reconstruction par les Compagnons) apparaît à l'angle de la façade ouest et était d'un grand secours car elle donnait une vue plongeante sur la Loire d'où venaient les envahisseurs. A la base de ce donjon se trouvait dit-on une porte dérobée qui donnait accès au souterrain qui reliait la Haultière à la tour de Lusançais.

Le domaine de la Haultière formaient une moyenne justice. Par la suite, les Seigneurs du lieu avaient droit de connaître les délits qui pouvaient être punis de soixante sous l'amende et de toutes obligations féodales de leurs vassaux.

Le châtelain de la Haultière disposait en l'occurrence de cette juridiction, d'un juge, d'un procureur fiscal, d'un greffier et d'une prison. Il avait pouvoir pour nommer des tuteurs et des curateurs pour les mineurs, pour faire apposer les scellés, pour procéder aux inventaires. Il fixait les limites entre les voies publiques et les propriétés de ses vassaux et jouissait de l'inspection des poids et mesures.

Propriétaire du Roc de Misery et de plusieurs autres carrières, le Seigneur de la Haultière permettait à la cité nantaise et ce depuis 1420, d'exploiter le granit des gisements, moyennant une rente annuelle. "Que de temps immémorial, dit un acte du 16 avril 1679, la Communauté de Nantes a payé à leurs prédécesseurs et leur paye actuellement pour chaque an, sur les deniers patrimoniaux, la somme de trente livres pour le droit de tirer de la pierre, depuis l'Hermitage jusqu'à l'estier de Chézine au long de la rivière Loire, par anciennes transactions dont ils sont inféodés vers le Roy."

Le premier propriétaire de la Haultière que nous révèlent nos vieilles chartes, et le Sieur Guillaume BOISLEVE, ce nom qui a la même origine que celui de BOILEAU, est un nom porté par une famille ancienne originaire d'Anjou, dont une branche dite BOISLEVE DE CHAMBELLAN en Rougé et de la branche en Bouguenais est déclarée de noblesse d'ancienne extration en 1671 et a fourni onze conseillers au Parlement de Bretagne.

La propriété de la Haultière se trouve en 1479 aux mains de Jeanne GOURDON, veuve de René de BELONAN.

Nous y voyons en 1529 une nouvelle famille, celle de l'écuyer Pierre LESPERRIER, Seigneur de TONNERRE de CHAMPLAY et de la Haultière, fondateur de l'Ermitage de Misery; il eut pour héritière Louise du PE, qui épousa Claude de HOULLE. En 1587, nous y voyons Pierre CHARETTE, issu d'une vieille famille italienne avec le Marquis de CARETTE, francisé sous le nom de Pierre de CHARRETTE.

Apparaît ensuite Prégent de KERMANO, Seigneur de KERALIO, de la HAULTIERE, le COUËDIC, LAUVERGNAC, KERDOUR et autres.

Jeanne de KERMANO, sa fille Marquise de MALESTROIT et Comtesse PONTALLEC, hérite de la Haultière et s'engagera dans la révolte de la Fronde.
Elle fera cession de son héritage en 1640 à Jean FOUCAULT, maître de comptes, à qui succède la Marquise de la TULLAYE.

Jean SALOMON BONNIER, Chevalier, reçoit de la Marquise l'héritage de la Haultière qu'il ajoute à ses titres de Seigneur de la Chapelle-COQUERIE de CHEZINE, de HUNAUDAIS, de la MUSSE et de LAUNAY.

Nous voyons par acte de vente de la terre de LAUNAY, le 25 novembre 1603 et dès 1536, qu'il eut Petite et Grande Haultière.

Item au Clos des Halles de Chantenay, au costé d'amont, la moitié indivise avec le pieux de la Petite Haultière, tantôt réunis, tantôt divisées, elles fournissent deux lignes de propriétaires.

En 1606, la Grande Haultière nous apparaît distincte et achetée à cette date par Michel RAGAUD, contrôleur général pour le Roy, en la prévôté de Nantes, Seigneur de la Haultière, de CADAUSAN en DOLAY, du BOIS DE LA JOLEXIERE et des PERRIERES, dont la noblesse fut maintenue à la réformation de 1670, et par les privilèges de la Mairie. Il portait en son blason :d'azur au croissant d'or.

Il est de notoriété que le Roi Henri IV soit venu à Nantes pour négocier avec le duc de MERCOEUR, protecteur de la Ligue et sa femme "La Belle Nantaise" Mairie de LUXEMBOURG, issue des PENTHIEVRE et aussi pour signer en la maison des Tourelles (supposition), sise quai de la Fosse (détruite au bombardement de septembre 1943) le fameux EDIT  de NANTES qui définissait un peu de liberté aux protestants. Le Roi aurait mis à profit son passage dans la cité, il serait venu au Manoir s'isoler avec son amie Gabrielle D'ESTREE "En la maison de repos de chasse, dite Manoir de la Haultière".

Le Seigneur RAGAUD et françoise d'ARCHON "Sieur et Dame de la maison et terres nobles de la Haultière présentent en 1608" Adveu au Roy notre sire... tant du dict lieu, appartenance de la Grande et vieille Haultière qu'ils tiennent proprement et noblement du dict Sieur Roy...

Apparaissent plus tard Michel, époux de Gilette d'ANTYE en 1513 et un Connétable de Rennes en 1533. Les CARRE étaient Seigneurs des Loges de MEZIERES, diocèse de Rennes, de la COUZEE, de CARREVILLE et de LUSANCAY maintenus en 1708. Ils portent en leur blason : Ecartelé au 1 et 4, d'azur au chevron d'argent chargé de 3 étoiles de gueule, au 2 et 3 d'azur à 3 bandes blanches d'argent surmontées de 3 bandes d'or : devise "NUSQUAM DEVIUS".

En 1712, ils étaient donc en possession de la Haultière, Noël Philippe CARRE DE LUSANCAY, écuyer conseiller du Roy, commissaire ordinateur de la marine de Nantes. Son fils Nicolas Philippe lui succède à la Haultière et à Lusançay.

Quelques années plus tard en 1742, la Marquise de la TULLAYE quittant sa résidence de Belle Ile des bords de l'Erdre, devait alors prendre repos en ce Manoir pour quelques temps.

De la révolution à la guerre de 1870

Le 17 juillet 1789, des marins envoyés à Paimpoeuf pour chercher du blé s'emparèrent à leur retour du Manoir. Quantité de provisions de toutes sortes et divers mobiliers furent dilapidés.

Bientôt, le château va devenir l'une des vingt geôles de CARRIER, délégué de Paris pour assurer le ravitaillement de la ville, arrivé pour réprimé aussi les menées subversives de l'Ancien Régime (les Chouans au nord, les Vendéens au sud, plus les armées royalistes). Il va réquisitionner le château des DE LUSANCAY. Le 29 octobre 1793, le Comité révolutionnaire nommait un concierge pour les prisons de LUSANCAY où il avait envoyé deux jours auparavant des étrangers détenus au Grand Capucin (quai de la Fosse). De ce fait, l'amiral DUCHAFFAULT, amiral de Louis XV, très connu pour ses idées en ce qui concernait l'Ancien Régime, trouvera la mort de la Haultière.

La famille de SAINT PERN à la Restauration occupe ensuite le Manoir. Jean-François Bertrand de SAINT PERN avait pour épouse Marie Eulalie SALOMON de DERVAL, celle-ci possédait en 1760, LAUNAY GODETIERE; elle restait veuve en 1808.

Elle légua la Haultière à son petit fils Jean-Louis Bertrand de SAINT PERN, époux de Marie CORNULIER, demeurant à Saint Félix.

Le 16 mars 1822, Jean ROBIN  et Jean SIMON achetaient en commun le domaine de la Haultière. Edouard THOMINE demeurant au Plessis Chantenay en fait à son tour l'acquisition le 21 décembre 1825, c'est à dire d'une ancienne maison bourgeoise servant de logement de fermiers, avec cave et grenier, cour avec puits, boulangerie, deux écuries, pressoir, petit cellier, toit à porcs, une belle pièce d'eau, plusieurs pavillons de jardin, trois terres composées chacune de logement d'exploitation et terre, vignes, labours et prés, carrière à pierres entourée de murs et pouvant contenir environ 11 hectares. Son fils Edouard THOMINE reçoit son héritage en 1842.

En janvier 1848, le Maire de Nantes Ferdinand FAVRE et son conseil furent d'un projet d'escalier s'élevant à 19000 F. Hélas, des difficultés devaient s'élever. Le 24 du mois suivant éclatait la Révolution qui jetait Louis Philippe vers l'Angleterre et la République connaissant troubles et agitations, l'érection de l'escalier devait être retardée, attendu que les terrains prévus appartenaient à des mineurs. Ainsi, l'escalier de l'Aiguillon connut maintes histoires, mais à tous les titres de Justice et de Religion, doit s'appeler : "l'escalier de Sainte Anne". L'année 1849 vit la construction du fameux escalier.

L'année 1856 annonçait une révolution dans la vie courante et déjà la prospection de la voie ferrée le long des quais était en cours.

La Haultière devint ensuite propriété GABORIAUD le 24 mars 1863.

A la chute de l'Empire en 1870 et à l'appel du Général CHARRETTE, les volontaires appelés "Mobiles de l'Ouest" viendront en ce Manoir souscrire leur engagement pour former l'Armée de la Loire.

Période de 1870 à 1968

Le 18 août 1883, Madame LAC obtint par adjudication publique le Manoir : c'est à dire l'antique "Hébergement" BOISLEVE et les terres environnantes et les transmet à sa fille Madame PEROTEAU, notre vingt troisième Châtelaine.

La propriété de la Haultière devait être annexées à la Commune de Chantenay en date du 6 avril 1906. Bâtiments et dépendances vétustes, devenus domaine communal, devaient alors assurer l'abri de quelques familles, mais aussi d'un service de l'octroi chargé de percevoir les droits sur les marchandises entrant à Nantes (cet impôt à été supprimé vers 1945).

C'est l'époque où le Maire de Chantenay, très libéral, voulant participer à l'essor économique de cette Commune va créer ce que l'on appellerait de nos jours, une zone industrielle sur les bords de la Loire (Nantes la bourgeoise n'en avait pas voulu). Il est alors nécessaire de faire venir de la main d'oeuvre venue de la Basse Bretagne (Finistère et Morbihan).

Le Manoir de la Haultière qui présente une construction de type Breton se transforme en H.L.M. avant la lettre. Les grandes pièces que les Compagnons ont reconstituées, étaient divisées en petites pièces où s'entassaient des familles, souvent avec de nombreux enfants. Le parler fut pendant longtemps le Breton. Le dimanche, les Femmes surtout et les Petits vont à la messe, les premières vêtues de leur costume traditionnel (coiffe et tablier).

1908, la ville de Nantes annexe les Communes suburbaines de Chantenay et Doulon. Le Manoir passe sous la régie de la ville de Nantes en 1920.

Le Manoir vieillassait et sa population aussi. Au lieu de continuer à abriter des travailleurs, petit à petit, ce fut un sous prolétariat qui constitua sa population.

En 1936, avec les lois sur les congés payés, la ville de Nantes achète la propriété pour en faire une Auberge de jeunesse. Hélas, cette municipalité ne dure pas et le projet est abandonné.

Depuis la libération en 1945, la municipalité attendait que des bâtiments soient construits pour évacuer les indésirables qui habitaient les locaux. En 1950 c'est chose faite. Les orifices sont bouchés et le Manoir s'endort en attendant une éventuelle restauration ou sa destruction.

Temps Nouveaux

Nous avons évoqué les ombres du passé, maintenant, il faut vivre le temps présent.

L'administration municipale ne pouvant consentir l'engagement de fonds très importants pour la remise en état des lieux, après tant d'années d'occupations indésirables qui devaient laisser des bâtiments saccagés et en ruine, ainsi que la jungle, avec la végétation parasitaire qui avait envahi cours et dépendances. Les services de la Mairie avaient semble-t-il décidé d'abandonner le logis à son triste sort. Ceci aurait eu pour conséquence indéniable de voir un joyau du patrimoine architecturale, au passé historique, disparaître sous les coups des bulldozers.

C'est alors que les Compagnons de la Cayenne Nantaise de l'Union Compagnonnique du Tour de France des Devoirs Unis, ont sollicité les autorités municipales et, unissant tous leurs efforts et leur bonne volonté d'oeuvrer, acceptèrent bénévolement d'ouvrir le chantier de restauration de cette vieille demeure seigneuriale;

L'apport des services techniques pour le gros matériel et les sacrifices financiers des Compagnons ont permis de conserver presque intact le seul bâtiment de ce type existant intra et extra-muros dans notre Cité.

Depuis la date de prise de possession de ces lieux, le 2 novembre 1968, les Compagnons de toutes les corporations réunies, se joignent dans un élan fraternel avec leur savoir, leur coeur, leur conscience et leur joie pour s'attacher à faire revivre le passé, ainsi que de conserver un joyau du patrimoine nantais, parmi les chefs d'oeuvre en péril.

Actuellement, en 1998, c'est à dire pendant 30 années, les Compagnons ont donné 360 000 heures de travail bénévole.

Chers visiteurs, vous pouvez admirer les chefs d'oeuvre exécutés pour leurs admissions, réceptions ou finitions par les Compagnons ainsi que des Chefs d'oeuvre de Meilleurs Ouvriers de France exécutés également par des Compagnons. Vous pourrez aussi découvrir un conservatoire de vieux outils souvent façonnés à la main et utilisés aux siècles passés par un ensemble de corporations anciennes transformant la matière mais aussi par de nouveaux métiers comme ceux de l'électricité qui remplacent ceux qui ont disparu. Une de nos salles abrite un ensemble d'objets et de documents retraçant l'histoire du Compagnonnage.

Chers visiteurs, nous sommes heureux de vous accueillir en ce Manoir restauré presque en totalité par les Compagnons du Tour de France des Devoirs Unis et nous vous en remercions sincèrement.

Si cette visite vous satisfait, devenez nos interprètes auprès de vos familles et amis auxquels nous réservons une bonne réception dans ce Musée, chef d'oeuvre local qui maintenant n'est plus en péril.

Fait en 1982 par "Nantais l'Appui des Devoirs"
Revu en 1991 par " Nantais le Bien Décidé"